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Paroles d'étudiants (7) : Céline, assistante sociale sur le tard

On peut être étudiant en travail social en approchant la quarantaine. On peut découvrir sur le tard l'intérêt de ces professions centrées sur l'accompagnement des personnes en difficultés. C'est le cas de Céline Perry qui, après diverses expériences professionnelles, a choisi de se reconvertir et de reprendre des études d'assistante sociale. Suite de notre série de portraits.



Ohlala, elle avait vraiment le trac, Céline. Elle scrutait le regard du journaliste qui était venu l'interroger là où elle termine sa formation, l'école pratique de service social (EPSS) de Cergy (Val d'Oise). Est-ce qu'elle était à la hauteur des attentes ? Est-ce qu'elle s'exprimait bien ? Devant la caméra, elle essayait de réprimer son tempérament expressif de méridionale, à l'accent chantant et aux gestes généreux.

Enthousiasme

En tout cas, s'il y a une chose qu'elle n'arrivait pas à réprimer, c'était bien son enthousiasme. Si certains disent, à tort ou à raison, que les étudiants sont gagnés par la morosité, alors il y a (au moins) une exception : Céline Perry. Elle ne cache pas, mais alors pas du tout, son plaisir d'avoir repris ses études (même si elle a plus d'une fois voulu jeter l'éponge), de découvrir un métier dont la perspective s'est dessinée très tardivement.

"C'est mieux payé que le social"

"Lorsque j'étais en 3e, j'avais un prof qui m'avait appris à fabriquer des pièces. Le fait de réaliser des objets me plaisait bien", raconte Céline qui a longtemps vécu à l'ombre de la Citadelle de Carcassonne. Logiquement, elle s'oriente vers une filière technologique qu'elle prolonge par un BTS en maintenance industrielle. Finalement, le charme tombe et elle interrompt son BTS.

Pour suivre son compagnon, elle se retrouve à l'autre extrémité du pays, à Strasbourg où elle travaille dans une entreprise automobile. Son boulot ? "J'étais ouvrière qualifiée en contrôle qualité", explique-t-elle. Et elle ajoute dans un sourire : "C'est mieux payé que le social".

Quitter un milieu masculin ?

Et puis, il arrive ce qui arrive parfois. Au bout de 4-5 ans, elle se lasse, enchaînant les CDD sans enthousiasme pour finalement abandonner. Mais que faire ? "J'avais 27 ans et j'ai fait un bilan de compétences grâce à Pôle emploi. La conclusion a été que je devais m'orienter vers le secteur social, médico-social et santé. Avant, je n'y avais jamais pensé." En fait, comme elle l'explique, Céline évoluait dans un milieu très masculin ; elle n'avais jamais pensé aller voir du côté de métiers considérés comme féminins.

Soif de connaissances

Dans un premier temps, Céline s'oriente vers le métier d'auxiliaire ambulancière, compromis parfait entre le monde des transports et celui de la santé. Elle exerce ce métier pendant cinq ans, se lasse de nouveau ? "La cadence de travail, 12 à 14 heures par jour, était très lourde", précise-t-elle. Mais cette expérience l'a mise en relation avec un tas de professionnels de la santé, des médecins, des infirmiers, etc. "J'avais une soif de connaissances avec l'envie d'avancer."

Accepter la frustration

Soit, mais comment faire pour financer ce désir ? "Faute de financement suffisant, je ne me suis pas lancée dans la formation d'infirmière et j'ai plutôt opté pour celle d'aide-soignante que je suivais parallèlement à mon travail d'ambulancière." Après sa formation, elle atterrit dans un accueil psychiatrique situé en Seine-Saint-Denis. Une vraie découverte (voir la vidéo) ! Au cours de trois années dans cet établissement, elle apprend une chose essentielle : la patience. "Notre travail ne débouche pas forcément sur un résultat. Il faut l'accepter. La frustration fait partie de notre métier."

D'aide-soignante, elle aurait pu évoluer vers infirmière. "Quand on travaille avec des malades psychiatriques, on ne peut pas se contenter de simples gestes techniques", explique-t-elle. Elle a envie de continuer sur la voie de l'accompagnement des personnes, quitte à s'éloigner des soins. "Une assistante sociale de la clinique m'a dit qu'elle me verrait bien AS."

"Personne n'est préparée à la mort d'enfants"

Quelque temps après, Céline intègre l'EPSS pour la formation d'assistant social. Depuis, elle est allée de découverte en découverte. A l'hôpital d'enfants de Margency (95), elle s'est confrontée avec la mort d'enfants. "Personne n'y est préparé, mais le fait d'être dans une équipe aide beaucoup", analyse-t-elle. Lors de son second stage long, dans une antenne locale du conseil départemental du Val d'Oise, elle s'initie à la pratique de l'entretien individuel. "La première fois, je ne savais pas par quoi commencer", explique-t-elle dans notre vidéo.

L'âge est-il un atout ?

Mais au fait, son âge plus élevé, son expérience de la vie constituent-ils un atout pour démarrer comme assistante sociale ? "C'est vrai que cela peut rassurer des personnes que l'on reçoit. Mais en même temps, une jeune de 20 ans peut avoir de l'aplomb." Pour Céline qui a décidé sur le tard de devenir AS, la motivation est le critère déterminant pour être une bonne professionnelle.

 



Retrouvez nos précédents portraits :

Le 9 octobre : Coralie, passion EJE (lire ici)

Le 16 octobre : Aurélien, un homme dans un "monde de femmes" (lire ici)

Le 23 octobre : Julien ou la passion pour les jeunes "cabossés" (lire ici)

Le 30 octobre : Emilie, l'AS qui voulait changer le monde (lire ici)

Le 6 novembre : Yoann, en Deis et en quête de sens (lire ici)

Le 13 novembre: Ophélie, le travail social sans tabou (lire ici)

 

Prochain portrait :

Le 27 novembre :  Ornella, une éducatrice spécialisée formée en Champagne et en... Angleterre

 

Noël Bouttier
Ecrit par
Noël Bouttier